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Le génocide Namibien : Le crime oublié du 20ème siècle ?

Si la Namibie est aujourd’hui un beau pays paisible doté d’une faune et d’une flore exceptionnelle, il n’en a pas toujours été ainsi. Derrière ce paysage paradisiaque, se cache une sinistre histoire.

 

Située au sud-ouest de l’Afrique, la Namibie est bordée géographiquement à l’ouest par l’océan Atlantique, au nord par l’Angola, au sud par l’Afrique du Sud, à l’est par le Botswana et au nord-est par la Zambie.

Sa densité de population est la plus faible en Afrique, avec une population totale de 2 630 073 d’habitants pour une superficie de 824 292 km2.

A l’instar de la quasi-totalité des pays du continent, la Namibie n’a pas échappé à la colonisation, et a été le théâtre de l’un des plus grands crimes oubliés du 20eme siècle.

Depuis la préhistoire, plusieurs peuples se sont succédé sur le territoire. D’abord, il était habité par les San, peuple nomade de chasseurs-cueilleurs qui sont les habitants les plus anciens de l’Afrique australe où ils vivent depuis plus de 40 000 ans. Ils sont rejoints progressivement par les Khoikhoi, dont la pression les amène à trouver refuge dans le désert du Kalahari. Ces derniers à leur tour, seront refoulés vers la seconde moitié du 1er millénaire, par la vague d’expansion Bantoue, majoritairement composée des Ovambos et des Hereros.

En 1486, les Portugais arrivent sur les côtes Namibiennes. Mais en raison de l’hostilité du climat, ils finissent par s’installer plus au Nord, sur les territoires qui constituent l’Angola aujourd’hui.

Vers 1680, c’est au tour des Néerlandais de s’installer sur les côtes de la Namibie. Toutefois, quelques années plus tard, ces derniers vont privilégier la région du Cap et les terres fertiles du Sud, dans ce qui deviendra aujourd’hui l’Afrique du Sud.

Ce n’est qu’à partir des années 1820 que les missionnaires allemands établissent les premiers postes missionnaires sur le territoire. Les missionnaires trouvent le pays occupé par les Hereros et les Namas en guerre constante. Ainsi, ils s’établissent sur la côte Ouest en 1878 et finissent par coloniser les lieux. Ils entreprennent alors une mission générale d’évangélisation qui concerne les peuples autochtones qui s’étend sur plusieurs années. En 1884, la région devient officiellement un protectorat allemand, appelé « sud-ouest africain allemand ». Les fermiers et les marchands allemands viennent progressivement s’installer sur les lieux.

Les Hereros, exaspérés d’avoir perdu leurs meilleures terres, empêchés de pratiquer leurs transhumances, et victimes également d’une peste bovine qui décime leurs cheptels, ne trouvent d’autre issue que la confrontation. Samuel Maharero soulève alors seul son peuple contre les colons allemands le 11 Janvier 1904. Il attaque une garnison basée à Okahandja et parvient à détruire les lignes de communication allemandes, chemins de fers et télégraphes. Berlin informé, décide de réagir avec une cruauté sans pareille.

Durant cinq mois, la répression s’organise chez les colons, sous la direction de Theodor Leutwein, puis sont armés six vaisseaux de guerre, sous le commandement du général Lothar Von Trotha qui débarquent le 11 Juin 1904 à Swakopmund avec d’importantes troupes, environ 15 000 soldats du corps de la Schutztruppe. En octobre, dans une zone située aux sources d’Ohamakari, sur un plateau appelé par les Allemands le Waterberg, il fait encercler les Héréros de trois côtés et les mitraille : c’est un véritable carnage qui n’épargne ni femmes ni enfants. Trotha ne leur laisse qu’une seule issue : le désert du Kalahari.

Alors que les Héréros survivants essayent d’y trouver refuge, Trotha fait empoisonner les points d’eau, dresse des postes de garde à intervalles réguliers avec ordre de tirer sans sommation à vue sur chaque Héréro, homme, femme ou enfant. L’ordre d’extermination officiel du général von Trotha est libellé en ces mots : « À l’intérieur des frontières allemandes chaque Herero, sans ou avec une arme, avec ou sans bétail, sera fusillé. Je n’accepterai plus désormais les femmes et les enfants, je les renverrai à leur peuple ou les laisserai être abattus ».

Les survivants sont enchaînés puis transportés vers 6 camps de concentration créés à cet effet par les Allemands à partir de Janvier 1905. Selon Serge Bilé, la moitié des prisonniers seraient morts en captivité, soit 7 862 personnes. En 1905, de nombreux Namas sont déportés vers Shark Island rejoignant les Hereros. Près de 2 000 Namas auront péri durant ce conflit soit par les armes, soit à la suite de mauvais traitements, disette, travail forcé, torture, ou absence de soins.

La guerre d’extermination menée par les troupes coloniales allemandes entre les années 1904 et 1908 a entraîné la mort de 80% du peuple Herero soit plus de 65 000 personnes, de plus de la moitié du peuple Namas et d’une large partie des troupes ethniques des Damara et San, ce qui en fait le premier génocide du 20ème siècle. En 1911, il reste officiellement 11 130 Hereros, soit près de 20% de la population originelle.

La Namibie accèdera à l’indépendance le 21 Mars 1990, après avoir vécu une double dépendance, d’abord en tant que colonie allemande appelée « sud-ouest africain allemand » 1884-1915 puis en tant que protectorat de de l’Afrique du Sud jusqu’en 1988.

C’est en 1989 que l’Afrique du Sud accepte l‘indépendance de la Namibie, en signant les accords de Brazzaville, en échange d’un cessez-le-feu définitif. Des élections ont lieu un an plus tard, et entérinent le processus d’indépendance. Samuel Nujoma, leader de la SWAPO, devient ainsi le premier président de l’histoire du pays.

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