Professeure Joséphine Guidy Wandja
Focus sur la première africaine agrégée des Sciences mathématiques
C’est l’une des figures emblématiques de l’intelligentsia africaine du siècle écoulé, mais aussi de celui en cours. Joséphine Guidy Wandja, mathématicienne ivoirienne née en 1945 au Cameroun, est en effet, la première femme agrégée africaine et docteure d’État en mathématiques, première femme africaine avec un doctorat de 3ème cycle en Sciences Mathématiques et première femme africaine professeure de mathématiques dans une université, notamment l’Université Félix Houphouet Boigny d’Abidjan-Cocody.
Un parcours brillantissime
Cette femme dotée d’une matière grise hors du commun, a très tôt dompté les Sciences Mathématiques, pourtant très redoutées en général par les jeunes filles en Afrique, en raison de leurs complexités. Entre juin 1965 et octobre 1969, Joséphine Guidy Wandja a obtenu douze certificats d’études supérieures dans des matières telles que les mathématiques générales, la physique mathématique, la mécanique générale, le calcul intégral, la théorie des nombres, etc. Elle a ensuite décroché le Doctorat 3ème cycle à l’Université de Paris 6 en 1971, après avoir soutenu de façon brillantissime sa thèse Sous les courbes fermées convexes du plan et le théorème des quatre sommets. En 1992, Guidy Wandja obtient le Doctorat d’État en Science Économie pour sa thèse intitulée » La dynamique d’intégration commerciale des pays de l’Afrique subsaharienne: cas de la Zone Franc » .
Son leadership dans le domaine des mathématiques en Afrique l’amène en Août 1983, à créer le Comité international des mathématiques dans les pays en développement. La réunion constitutive de ce comité a eu lieu à Varsovie en Pologne, lors du Congrès international des mathématiciens qui s’y tenait. Au cours de cette réunion, professeure Guidy-Wandja a été élue présidente du Comité international sur les mathématiques dans les pays en développement. Malheureusement, ce Comité international sur les mathématiques dans les pays en développement n’a pas réussi à obtenir le soutien international et a rapidement cessé d’exister.
Son cambat, inciter les jeunes filles à aimer les mathématiques
Joséphine Guidy Wandja veut voir de plus en plus de jeunes filles s’intéresser aux mathématiques. Elle se bat pour amener Celles-ci à briser la glace qui les empêchent de faire corps avec les mathématiques. Lors d’une conférence à Abidjan, elle a dévoilé les stratégies à mettre en œuvre, afin que les jeunes filles s’intéressent davantage aux Mathématiques. « J’appelle mes jeunes soeurs, mes filles à vaincre les attitudes dissuasives et l’inconscience collective qui donnent une mauvaise image de la fille étudiante en Maths, traitée de garçon manqué, fille laide qui passe ses nuits avec des équations au lieu d’aller en boîte de nuit », a-t-elle recommandé.
La première femme agrégée en sciences Mathématiques a demandé aux parents de ne pas pousser leur fille à « refuser tout ce qui représente logique, rigueur, pouvoir, création, pensant que c’est à ce prix qu’elle trouvera un mari ». Elle a demandé, plus tôt, de soutenir une éducation non-différenciée des filles et garçons, où la petite fille ne jouera pas qu’à la poupée et le petit garçon au foot et jeux électroniques. « Vaincre les esprits sexistes que véhicule l’éducation différentiée et qui font fuir nos étudiantes des amphis et embarrassent les femmes enseignantes », a-t-elle proposé.
» Assimiler les mathématiques, ce n’est pas sorcier »
Mieux, elle a demandé de créer ou de soutenir des programmes de sensibilisation, d’émulation et de motivation des jeunes filles, en Mathématiques, dotés annuellement de prix ou bourses à des filles sélectionnées par un jury, mais aussi de servir aux filles des exemples de femmes en Mathématiques ou en sciences, afin qu’elles puissent se projeter et dire « Yes I Can ».
Elle affirme que pour assimiler facilement les Mathématiques, ce n’est pas sorcier. « Il faut apprendre régulièrement ses cours et ne pas faire d’impasse. Il y a une certaine logique dans l’agencement des cours de Mathématiques dans une classe. De ce fait, lorsque tu fais l’impasse sur des leçons, tu as de sérieuses difficultés à comprendre les chapitres qui suivent. Si tu fais l’ impasse sur les « dérivés », tu ne sauras pas construire le tableau de variation d’une « fonction », et donc tu ne pourras pas construire la courbe d’une fonction », a-t-elle indiqué.
Joséphine Guidy Wandja a conseillé également de faire beaucoup d’exercices. Elle a souligné qu’un exercice de Mathématiques doit être décomposé en deux parties: l’Hypothèse et la Conclusion. « L’hypothèse regroupe la ou les données du texte. La conclusion regroupe les résultats attendus. La démonstration permet de passer de l’hypothèse à la conclusion. Il faut alors connaître les définitions et autres résultats mathématiques relatifs aux notions abordées dans le texte », a-t-elle mentionné.
Une mathématicienne écrivaine
Professeure Joséphine Guidy Wandja, est également auteure de plusieurs œuvres à succès qui touchent aussi bien son domaine de prédilection, que les faits de société. L’on peut citer » Élections Démocratiques et mathématiques » paru en 2020, » Excision ? Mutilation sexuelle ? Mythe ou Réalité ? (1987), « Yao crack en maths » (1985), » Répertoire des enseignants et chercheurs africains » (1984), » Peut-on dévaluer le franc CFA? » (1992), pour ne citer que ces oeuvres.
Professeure Joséphine Guidy Wandja est indéniablement une femme à la tête bien faite, qui a marqué son temps en s’imposant dans un domaine de connaissance réservé aux hommes. L’Afrique lui doit une fière chandelle.
Thom Biakpa
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