
Ahmed Sefrioui : Zoom sur l’un des pionniers de la littérature marocaine d’expression française
Photo: Faceapp
Ahmed Sefrioui, écrivain marocain de renom, voit le jour en 1915 à Fès. Considéré comme l’un des pionniers de la littérature marocaine d’expression française, il se passionne pour le patrimoine culturel de son pays. Au cours de sa carrière, il occupe divers postes administratifs, notamment aux Arts et Métiers de Fès, puis à la direction du tourisme à Rabat. Son engagement pour la culture se manifeste par la création de plusieurs musées, tels que ceux de Batha, Oudaya et Bab Rouah. Il s’éteint le 25 février 2004.
Ses œuvres
Parmi ses contributions littéraires, on trouve :
– Le Chapelet d’ambre (Le Seuil, 1949) : Son premier roman, qui évoque la ville de Fès et lui vaut le grand prix littéraire du Maroc, une première pour un auteur marocain.
– La Boîte à merveilles (Le Seuil, 1954) : Ce roman ethnographique présente Fès à travers les yeux du jeune Mohammed, marquant le début de la littérature marocaine d’expression française.
– La Maison de servitude (SNED, Algérie, 1973).
– Le jardin des sortilèges ou le parfum des légendes (L’Harmattan, 1989).
Les traces de son œuvre
Sefrioui est souvent perçu comme le pionnier de la littérature marocaine d’expression française. Né à Fès de parents berbères, son parcours reflète celui des jeunes Marocains scolarisés sous le protectorat. L’école coranique constitue une étape essentielle avant d’accéder aux établissements scolaires coloniaux, réservés aux fils de notables ou aux indigènes.
Caractéristiques de l’œuvre de Sefrioui
Les critiques, parfois sévères, soulignent que l’auteur de La Boîte à merveilles peine à se libérer de l’héritage exotique et pittoresque de ses prédécesseurs. Son style et sa technique d’écriture semblent s’adresser davantage à un public étranger qu’à un lectorat marocain. Certains observateurs notent que son œuvre, bien que riche en éléments ethnographiques, manque d’engagement face à l’occupant français et montre peu d’intérêt pour les événements marquants de son pays.
Dans ses récits, le lecteur est immergé dans une forme d‘« autofiction » où la réalité se mêle à la rêverie. Bien que l’on puisse y déceler une authenticité et une fraîcheur grâce à la perspective enfantine, des procédés évoquant le roman exotique, tels que l’accent mis sur le pittoresque et l’inclusion de mots arabes traduits en bas de page, témoignent d’une visée destinée à un public étranger à la culture marocaine.
Cependant, des spécialistes de la littérature marocaine d’expression française, moins critiques, défendent Sefrioui en affirmant que l’absence du colon dans ses récits est une manière subtile d’ignorer cet « Autre » avec un certain mépris. Ils soulignent que l’intégration de l’oralité, des expressions culturelles populaires et de la vision soufie de l’existence dans ses romans constitue une approche savante pour contrer l’ethnocentrisme et l’égocentrisme des colonisateurs européens, qui considéraient ces formes d’expression comme du simple « folklore » ou de la « sous-culture ».
Ainsi, l’œuvre d’Ahmed Sefrioui demeure un témoignage précieux de la richesse culturelle marocaine, tout en suscitant des débats passionnés sur son héritage littéraire.
Thom Biakpa
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