Nouvelle album de Pédro Kouyaté : Un voyage exceptionnel au cœur du Blues Malien
« Following », le nouvel album de Pédro Kouyaté est un véritable voyage au cœur du Blues malien / Photo: pedrokouyate.com
Élevé sous l’influence de deux géants de la musique malienne, Boubacar Traoré et Toumani Diabaté, Pédro Kouyaté a su tracer sa propre voie musicale, se démarquant avec son nouvel album, Following. Cet opus nous plonge dans des atmosphères envoûtantes, peuplées de voix vibrantes et d’émotions profondes.
Pour Pédro, le processus créatif est comparable à la magie de la photographie argentique. Dans sa « chambre noire », il s’isole complètement du monde extérieur, cherchant à oublier ses préoccupations quotidiennes. « J’essaie de ne penser à rien, ce qui est très difficile », confie-t-il. Ce Parisien d’adoption, dont le blues a longtemps résonné dans les couloirs du métro, se laisse porter par un tumulte d’idées et de souvenirs, transformant son expérience en une véritable quête artistique. « Ça te met dans un couloir de visions, de sensations. Toute ta vie change », explique-t-il avec une intensité théâtrale.
Son album Following, qui signifie « suite », est paradoxalement une rétrospective sur son passé, un hommage à ses racines qui continuent de l’inspirer. Pédro, qui ne maîtrise pas moins de 19 instruments, aborde la musique avec la délicatesse d’une femme tamisant le riz, cherchant à capturer l’essence de ses sensations sans jamais forcer le processus créatif. Il a su s’entourer d’artistes aux horizons variés, tels que les jazzmen Erik Truffaz et Manu Katché, le chanteur Arthur H, et le rappeur Oxmo Puccino, témoignant ainsi de sa vision ouverte et décloisonnée de la musique.
La pochette de son album, où il arbore une toque léopard, évoque des figures emblématiques comme le maréchal Mobutu, tout en soulignant la majesté de l’Afrique et son « âme tribale ». Pédro évoque également l’influence de son père, cadreur dans le cinéma, qui lui a appris l’importance du visuel et de l’esthétique. « Mon père était un humain à la Dali mélangé de Pessoa », se remémore-t-il.
L’album prend une tournure poignante lorsqu’il reprend le discours emblématique de Thomas Sankara sur la dette, prononcé en 1987. Pédro se remémore avec émotion sa rencontre avec le président burkinabé, un moment gravé dans sa mémoire. « Je me souviens de sa voix, de son odeur, son regard – incroyable », raconte-t-il, évoquant la tristesse qui l’a envahi le jour de sa mort.
Né dans une famille aisée, Pédro a vu sa vie basculer lorsqu’il a émigré en France. À Bamako, il a croisé le chemin de Toumani Diabaté, qui l’a pris sous son aile. En tant que jeune garçon, il était le « petit qui fait les commissions », assistant aux débuts du Symmetric Orchestra, une expérience qui a façonné son parcours musical. « Quand tu les vois, tu te tais et tu regardes », se souvient-il, conscient de l’importance de l’humilité dans l’apprentissage.
Aujourd’hui, Pédro Kouyaté incarne la voix d’une génération, un conteur passionné qui partage ses souvenirs et ses expériences avec une authenticité touchante. « On ne peut pas reprocher à un Kouyaté de parler », sourit-il, fier de son héritage et de son parcours, un véritable ambassadeur du blues malien.
Thom Biakpa
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