Seconde Guerre mondiale : Le rôle crucial de l’Afrique dans la victoire de 1945

Des soldats coloniaux faits prisonniers par des soldats allemands, dans le secteur de Reims en 1940/ AFP

Le 8 mai 1945, l’Allemagne nazie capitule face aux troupes alliées, marquant ainsi la fin des combats de la Seconde Guerre mondiale en Europe. Ce conflit, le plus meurtrier de l’histoire, a causé la mort d’au moins 60 millions de personnes. Si la victoire est célébrée aujourd’hui par les pays occidentaux et demain en Russie, elle a également eu des répercussions significatives sur le continent africain, où des centaines de milliers de combattants ont joué un rôle déterminant sous les uniformes français et britanniques. Leur engagement a non seulement contribué à la victoire, mais a également ouvert la voie à des mouvements de décolonisation qui allaient transformer le paysage politique du continent.

Une mobilisation historique

En 1940, près de 10 % de l’armée française mobilisée est composée de troupes maghrébines, africaines et malgaches, représentant environ 500 000 hommes. Parmi eux, 179 000 tirailleurs sénégalais, dont 40 000 engagés dans les combats, et 320 000 Maghrébins. Ces soldats ont été essentiels dans les efforts de guerre, mais ils ont également été victimes de la brutalité du conflit. Au cours de la débâcle, les soldats noirs ont été ciblés par les nazis, avec de nombreux cas d’exécutions, comme celles survenues à Clamecy, Chasselay ou Airaines, où le capitaine gabonais Charles N’Tchoréré a perdu la vie.

La France libre et l’Afrique

Alors qu’une France s’avoue vaincue, une autre continue le combat. Le 26 août 1940, le Tchad devient le premier territoire à rallier le général de Gaulle. Son gouverneur, Félix Eboué, prend la tête de l’Afrique-Équatoriale française, transformant cette région en une plateforme économique et stratégique majeure. Ndjamena devient le point de départ des premiers succès militaires de la France libre contre les Italiens en Libye, sous le commandement du général Leclerc. Brazzaville sert de capitale jusqu’en juin 1943, lorsque les autorités transitoires s’installent à Alger.

Un accélérateur de décolonisation

Les soldats maghrébins et les tirailleurs forment le gros de la nouvelle armée, participant à des débarquements en Italie puis en Provence. Cependant, ils sont souvent écartés des opérations en raison du « blanchiment » des troupes exigé par les Américains. En métropole, environ 5 000 Africains et Malgaches, déserteurs ou prisonniers évadés, rejoignent les rangs de la résistance FFI (Forces françaises de l’intérieur), comme le tirailleur guinéen Addi Ba. Au total, 21 500 Africains et Malgaches perdent la vie entre 1939 et 1945 sous uniforme français, ainsi que 16 600 Maghrébins. Parmi les 1 030 compagnons de l’Ordre de la Libération, on compte 14 Africains.

Cependant, ce combat pour des droits universels engendre également des déceptions. Les promesses d’émancipation ne sont pas tenues, et dès le 8 mai 1945, une manifestation indépendantiste algérienne est réprimée à Sétif. Ce conflit devient un catalyseur pour les mouvements de décolonisation, avec des leaders comme l’Algérien Ahmed Ben Bella, ancien combattant de l’armée française, qui émergent pour revendiquer l’indépendance.

L’engagement britannique

Du côté britannique, plus de 500 000 Africains ont été mobilisés durant le conflit, combattant en Afrique de l’Est, en Europe, au Moyen-Orient et en Asie. Leur contribution a été tout aussi significative, renforçant l’idée que l’Afrique a joué un rôle crucial dans la victoire des Alliés.


La Seconde Guerre mondiale a été un tournant non seulement pour l’Europe, mais aussi pour l’Afrique. Les sacrifices et l’engagement des soldats africains ont non seulement contribué à la défaite du nazisme, mais ont également semé les graines de la décolonisation. Alors que le monde se souvient de la victoire de 1945, il est essentiel de reconnaître et d’honorer le rôle fondamental que l’Afrique a joué dans ce chapitre de l’histoire.

Thom Biakpa