Vie en société – Le droit d’aînesse, un puissant pouvoir en Afrique
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La vie au sein des sociétés africaines est régie par plusieurs principes. Au nombre de ceux-ci, le droit d’aînesse. C’est ce droit que possède tout individu qui a eu le privilège de naître avant tous les autres dans une famille, ou encore qui est issu d’une génération qui en a vu naitre d’autres. Un droit apparemment banal, mais qui revêt un puissant pouvoir.
Ainsi, dans les communautés africaines, l’aîné dans une famille est digne d’un certain respect que lui confère la société. En effet, selon la logique des sociétés africaines, l’aîné se présente comme le remplaçant direct des parents en leur absence. Par conséquent, il jouit de manière naturelle et légitime de certains droits qui normalement ne reviennent qu’aux parents.
De fait, l’aîné mérite respect et considération. Voilà pourquoi la société traditionnelle exige des moins âgés de céder par exemple le passage aux plus âgés. De même, les aînés ont une priorité de siège sur les plus jeunes. Ainsi, lorsqu’à un rendez-vous, un plus jeune est assis sur un siège, à l’arrivée d’un aîné, il est tenu de céder sa place à ce dernier par respect du droit d’aînesse. Toujours, au nom de ce droit de fait, au cours des réunions, il revient au plus âgé de parler en dernière position et après, tout le monde se tait. C’est également sur la base du respect de ce droit, qu’il n’est pas permis à un jeune de tendre la main à un plus âgé que lui en voulant le saluer. Seul le plus âgé a la prérogative de faire ce geste vers le plus jeune en en premier.
En outre, autour des repas communautaires comme il est de coutume dans les familles africaines, seul le plus âgé a le droit de manger la viande ou le poisson qui est dans la sauce en premier. Autant d’exigences découlant du droit d’aînesse qui, de nos jours, tendent à disparaitre du fait de l’évolution et de l’intrusion de la culture occidentale dans les mœurs africaines.
En effet, si autrefois, le respect de ce principe était l’essence de la société africaine, il est devenu pour la nouvelle génération un poids difficile à supporter. Puisqu’il devient de plus en plus difficile de respecter même les géniteurs, le droit d’aînesse a perdu toute son essence. Ainsi, dans une société de plus en plus matérialiste, seuls ceux qui possèdent une grande richesse jouissent de ce droit quand bien même, ils sont jeunes. Par conséquent, à cause du matériel, aujourd’hui, il n’est pas rare de voir des aînés obligés de lécher les bottes aux plus jeunes qu’ils n’hésitent pas à appeler poliment et gentiment « grand-frère ». Pire dans les réunions de famille, ce n’est plus le plus âgé qui parle en dernière position, mais plutôt celui qui détient le nerf de la guerre, même s’il était le plus jeune de la famille.
Ainsi donc, le droit d’aînesse n’est plus forcément un acquis, mais un droit mérité par la position sociale ou économique de l’individu, l’âge importe peu. Cependant, il est à souligner que plusieurs des aînés se font déchoir de leur droit d’aînesse par leur manque de sagesse ou par négligence. C’est ce qui faisait dire à l’écrivain malien Massa Makan Diabaté que » le premier-né n’est pas toujours l’aîné « .
Vivement que la jeunesse ne perde pas de vue ce principe qui parfois sauve de certains désastres de la vie devant lesquels les moyens financiers ne peuvent absolument rien.
Thom Biakpa
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