Phénomène des pleureuses professionnelles en Côte d’Ivoire : Ces femmes qui donnent une dimension plus solennelle et émotive aux funérailles
Des pleureuses professionnelles en action / Getty Images
En Côte d’Ivoire, le deuil est un moment empreint de rites et de traditions qui varient d’une région à l’autre. Parmi ces pratiques, le phénomène des pleureuses professionnelles, appelées « pleureuses » ou « pleureuses de métier », occupe une place singulière. Ces femmes, souvent engagées pour pleurer lors des funérailles, incarnent une tradition profondément ancrée dans la culture ivoirienne et principalement en pays bété, une ethnie de l’ouest de la Côte d’Ivoire, tout en s’adaptant auxévolutions sociétales contemporaines.
Une tradition ancestrale
Les pleureuses professionnelles ont pour rôle de pleurer et de chanter des lamentations lors des cérémonies funéraires. Leur présence est censée rendre hommage au défunt et apporter du réconfort à la famille en deuil. Dans de nombreuses cultures africaines, le chagrin est exprimé de manière collective, et les pleureuses jouent un rôle essentiel dans cette dynamique. Elles sont souvent perçues comme des porte-parole des émotions de la communauté, exprimant la douleur et la perte à travers des chants et des pleurs.
Un métier à part entière
De nos jours, le métier de pleureuse est devenu une véritable profession pour certaines femmes en Côte d’Ivoire. Elles sont souvent sollicitées par des familles qui souhaitent donner une dimension plus solennelle et émotive à leurs funérailles. Ces pleureuses professionnelles peuvent être engagées pour des événements variés, allant des obsèques modestes aux cérémonies plus élaborées. Leur rémunération peut varier en fonction de la notoriété de la pleureuse, de la durée de son intervention et de la complexité de la cérémonie.
Une économie informelle
Le phénomène des pleureuses professionnelles s’inscrit dans une économie informelle qui reflète les réalités socio-économiques du pays. Pour de nombreuses femmes, ce métier représente une source de revenus indispensable, surtout dans un contexte où les opportunités d’emploi formel peuvent être limitées. Les pleureuses, souvent issues de milieux modestes, trouvent dans cette activité une manière de subvenir aux besoins de leur famille tout en préservant une tradition culturelle.
Un équilibre entre tradition et modernité
Si le métier de pleureuse professionnelle est ancré dans la tradition, il n’échappe pas aux influences de la modernité. Avec l’évolution des pratiques funéraires et l’urbanisation croissante, certaines pleureuses adaptent leur art pour répondre aux attentes d’une clientèle de plus en plus diverse. Elles intègrent des éléments contemporains dans leurs performances, tout en respectant les rites traditionnels. Cette hybridation permet de maintenir la pertinence de leur rôle dans un monde en constante évolution.
Les défis du métier
Malgré son importance culturelle et économique, le métier de pleureuse professionnelle n’est pas sans défis. Les préjugés entourant cette profession peuvent parfois stigmatiser celles qui l’exercent. De plus, la concurrence entre pleureuses peut être rude, et certaines d’entre elles doivent constamment se réinventer pour rester pertinentes sur le marché. La pérennité de cette tradition dépend également de la transmission des savoirs et des compétences aux générations futures.
Le phénomène des pleureuses professionnelles en Côte d’Ivoire est un reflet des dynamiques culturelles, sociales et économiques du pays. En alliant tradition et modernité, ces femmes contribuent à la richesse du patrimoine culturel ivoirien tout en répondant aux besoins contemporains des familles en deuil. Leur rôle, bien que souvent méconnu, mérite d’être reconnu et valorisé dans le cadre des pratiques funéraires et des expressions culturelles de la Côte d’Ivoire.
Thom Biakpa
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